Signer un CDD de 5 ans, avec salaire garanti, après 1 an au chômage, c’est le rêve de beaucoup de personnes privées d’emploi. Territoire zéro chômeur de longue durée (TZCLD) propose aux chômeur.euses de créer leur emploi dans une démarche non concurrentielle, répondant aux besoins du territoire, dans le champ social et écologique.
Le 25 mai dernier, le Comité européen des régions a voté à l’unanimité un rapport ayant pour objet la mise en place du droit à l’emploi en Europe. Ce texte, inspiré de l’expérimentation TZCLD, préconise un financement de 750 millions d’euros sur cinq ans.
Le projet « Territoires zéro chômeur de longue durée » a été porté pour sa phase de démarrage par ATD Quart Monde en partenariat avec le Secours catholique, Emmaüs France, Le Pacte civique et la Fédération des acteurs de la solidarité. L’idée est qu’une personne sans emploi a un coût pour la société et génère un manque à gagner en impôts et cotisations sociales. Elle vit une chute en estime de soi, bien-être, épanouissement et sentiment d’utilité. Rediriger les coûts liés à la perte d’emploi (RSA, Assurance chômage, CMU et autres coûts induits dans la santé, la sécurité, le logement, la protection de l’enfance…) dans ce dispositif pour financer les CDI est ce qui porte ce projet.
L’association TZCLD créée en 2016 a pour objet l’animation et le développement du projet dans ses différentes étapes. La loi a permis à 10 territoires d’expérimenter le droit à l’emploi. Depuis le 14 décembre 2020, une nouvelle loi sécurise ces 10 premiers territoires et permet d’étendre l’expérimentation à 50 nouveaux territoires.
Mélanie EGALON, 43 ans, nous livre son expérience dans ce dispositif où elle a été embauchée à son ouverture en 2016 à Jouques, village de 5000 habitants, dans les Bouches-du-Rhône (13).
Comment a commencé cette aventure ?
Au début, on était une vingtaine d'embauché.es. Ce nombre augmentait régulièrement. On a commencé par un diagnostic de terrain pour déterminer les activités envisageables au sein du territoire Jouquart. Ensuite, il a fallu composer avec tous.tes les salarié.es du projet pour construire les axes de développement de l’activité salariale. Et, ce n’était pas si simple de s’organiser pour prendre des décisions. Mettez dans la même pièce des moins de 25 ans sans expérience, des plus de 25 ans avec des études supérieures et peu d’expérience, des quarantenaires avec des diplômes et de l'expérience et des quinquagénaires avec parfois zéro diplôme, mais beaucoup de compétences spécialisées et d’expériences diverses et essayez de coordonner toutes ces forces vives ! On était parfois accompagné par les animateurs du dispositifs, mais les premières années pas assez souvent.
C’était quoi pour vous TZCLD ?
Il fallait garder en tête que c’était une expérimentation accordée et soutenue par l’Etat, le département et les collectivités. On signait un CDI de 5 ans. On avait une grande liberté dans les heures travaillées, dans les postes à créer. Et, on ne voulait pas gâcher ce qu’on prenait pour un cadeau. En même temps, on avait beaucoup de pression, comme tout.e autoentrepreneur.euse. En plus, il fallait créer son emploi sans être concurrentiel, en répondant aux besoins du territoire. Et, surtout stabiliser son activité, car on ne savait pas si dans 5 ans, les salaires resteraient garantis par le dispositif TZCDL.
Comment étiez-vous organisé.es en interne ?
On était tous.tes d’accord pour de l’horizontalité et de l’égalité dans les salaires. Après avoir décidé d’ouvrir une ressourcerie, des parcours commentés qui suivent les GR pour les touristes, de la location de vélos électriques, il a fallu créer des postes de coordinateurs. Et là, il a fallu décider combien on les paierait. Ce ne fut pas facile de s’accorder. Mais on a réussi pour 100 euros de plus pour eux, et 200 de plus pour le directeur. On ne voulait pas de trop grands écarts.
Est-ce que ce fut bénéfique pour vous ?
Complètement ! Le retour à l’emploi est difficilement envisageable quand on en a été éloigné longtemps. Il y a l'organisation de la mobilité, de la garde d’enfants et surtout de la confiance en soi, du regard des autres… J’ai pu m’épanouir en confiance, devenir primo-accédante et envisager de nouveau mon employabilité ailleurs. Enfin, l'aventure humaine fut très enrichissante.
