Presse indépendante : un fragile contre-pouvoir
Réunion ouverte au public tenue le 30 novembre dernier pour délibérer et débattre de leurs travaux, 100 médias indépendants et organisations ont présenté leur 59 propositions pour structurer et défendre la liberté de la presse. Retour sur cette assemblée intitulée « Libérons l’information des pouvoirs politiques, des médias de la haine, des milliardaires ».
Après le lancement des États généraux présidentiels de l’information le 3 octobre 2023, le Fond pour une presse libre (FPL), organisme à but non lucratif ayant pour objet « de défendre la liberté de l’information, le pluralisme de la presse, l’indépendance du journalisme » a voulu répondre à ce qu’il considère comme une mascarade au vu des actions posés à l’encontre du droit fondamentale à l’information.
Le droit d'informer et d’être informé.es est un bien commun. La concentration des médias dans les mains de capitaines d’industries milliardaires, dont les œuvres principales ne sont pas du journalisme, contribue à biaiser l’information transmise dans leurs journaux et chaînes télévisées. Desservir ses actionnaires en publiant sur leurs méfaits ? La vitalité de la démocratie, la qualité du débat public perdent de leur substance dès lors que l’information ne reflète pas les faits, ni la réalité de ce que demande la dystopie de la croissance économique, chère à ces capitaines d'industrie. Cette croissance économique qui n’a été possible qu’au dépend d’une biodiversité sacrifiée, d’une partie de l’humanité exploitée et aujourd’hui majoritairement abandonnée aux frontières, d’une aliénation publicitaire sommant d’acheter toujours plus. La qualité de l’information journalistique entière est questionnée dans ce paysage audiovisuel où ces problématiques majeures sont amoindries.
Avoir accès à un canal de la fréquence publique et donc à un bien commun, même si le média est privé, impose le respect d’une charte signée avec le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) où des règles déontologiques claires sont explicitées : « le pluralisme des courants de pensées et d’opinion » et l’« honnêteté et indépendance de l’information et des programmes » font partie du contrat.
Quant aux subventions pour l’information du ministère de la culture, annoncées chaque mois de septembre, les montants des aides directes à la presse s'élèvent à 110,4 millions d’euros en 2022. Le groupe les Echos-le Parisien de Bernard Arnaud remporte la plus grosse dotation avec 14,2 millions d’euros. En avait-il réellement besoin ? C’est toutes ces problématiques que veulent réformer les États généraux de la presse indépendante.
Ayant travaillé pendant 2 mois sur les constats de la liberté de la presse en France et les enjeux à défendre, 4 groupes de travail sur 4 thématiques se sont dégagés. Concentration des médias, actionnariat, droits des rédactions. Renforcement du droit à l’information. Lutte contre la précarisation de journalistes. Réforme des aides publiques à la presse. On retrouve dans les 59 réformes ces propositions suivantes : n°4 « interdire à tout groupe industriel dont l’activité principale n’est pas l’information de devenir l’opérateur direct d’un média ». n°17 « le délit de presse n’a pas sa place devant les tribunaux de commerce. Il faut prévoir des immunités de poursuites civiles ». n°20 « Adopter une définition claire et ambitieuse des procédures baillons ». Ces préconisations ont été transmises à plusieurs ministres, aux parlementaires et à l’équipe des États généraux présidentiels de l’information afin de participer activement à la réforme souhaitée.