Monépi, la ruée vers l’or du bien commun

Vouloir s’alimenter local et de qualité sans faire des kilomètres en voitures, ni enrichir les supermarchés, mais en favorisant les petits producteurs du coin tout en recréant de la dynamique de quartier, voilà ce que propose Monépi.

Présentation de l'Épi de Gurcy
©Monépi

Créée en 2017 en région Parisienne, Monépi est une plateforme internet qui suscite l’engouement du public car elle permet gratuitement la création et le fonctionnement d’épiceries alternatives sur toute la France. Quelle est sa démarche?

Les clients sont tous adhérents de l’épicerie qui la font bénévolement fonctionner avec un calendrier de roulement. Mais surtout, dans cet espace se développe la vie locale, le tissage de liens autour d’évènements qui dynamisent le quartier. Et c’est certainement là sa plus grande force car sous couvert de gérer l’épicerie, ce sont des relations humaines qui se cultivent et se nourrissent.

Alain Poullot, co-fondateur, nous raconte. Deux ans après l’ouverture de la première épicerie qu’ils ont ouverte dans les Yvelines en 2015, lui et une dizaine d’adhérents lancent la SAS (société par action simplifiée) Monépi. Toutes les compétences nécessaires pour créer la plateforme étaient réunies dans leur groupe. En moins d’une année l’entreprise a pu voir le jour.

À la question pourquoi Monépi, Alain Poullot répond : 
« On a voulu mettre en place un outil qui permette à toutes les associations telles que nous de créer une épicerie participative et résiliente, sur toute la France et gratuitement. On a choisi de créer une SAS car on voulait démontrer que l’entreprise n’avait pas obligatoirement de raison d’être profitable. Et on a tout réfléchi en ce sens. »

Pouvez-vous nous dire qui êtes-vous, d’où vous parlez ?
« Aux premières heures de Monépi, les journalistes nous demandaient comment ça fonctionnait. Dans l’épicerie, tout le monde s’appelait Marie. Car nous voulions démontrer que c’est la force du collectif qui a du sens dans l’Épi. Une seule personne ne peut rien faire. Et donc c’est vraiment un assemblage de personnalités qui peut composer un commun. Donc mon importance dans tout cela… n’est pas si importante. Mais je dirais que la vraie chance est que j’ai pu avoir du temps pendant une année de réflexion et la chance de pouvoir coordonner le groupe de travail aussi. Cela m’a permis d’être dedans et en même temps de développer la partie informatique. Cela m'a permis d’avoir tous les moyens de compréhension autour des Épis. Sinon, je suis né en Bourgogne, j’ai eu une formation d’ingénieur, j’ai eu des responsabilités dans les réseaux câblés. »

Quelle est la gouvernance de Monépi ? 
« Nous avons choisi une organisation horizontale, la présidence est tournante et change tous les ans. Et toutes les décisions sont prises collégialement. Il n’y a pas de chef.fe, personne n’a plus de poids qu’un.e autre. »

Comment expliquez-vous vos choix pour le fonctionnement de la plateforme et des Épis ? 
« La force de l’Épi est qu’il a répondu à un besoin. La composition de l’équipe et le maillage avec le village, ont permis la création de la première épicerie. Et en 2015, ce côté participatif, associatif, un peu ludique, était quelque chose d’utopique. Très vite des communes voisines sont venues avec le souhait d’adhérer. Mais cela n’était pas cohérent car les Épis se veulent locales, on y vient à pied, à vélo. Le but est aussi de décarboner, d’être dans la transition énergétique. Alors nous avons voulu les aider à créer un épi chez eux. Et là, on s’est rendu compte qu’il fallait construire une plateforme informatique où les outils pouvaient être utilisés par n'importe qui, pour annuler les freins de trouver un informaticien dans chaque épicerie. Il fallait aussi qu’elle soit gratuite. Enfin, la gestion de l’Épi est basée sur la force du commun, pour que la charge de la vie associative soit répartie sur un maximum de personnes pour limiter l’épuisement, et que personne ne soit indispensable. »

Leur credo : « La force du collectif au service du bien commun. » qui est à reconstruire pour Alain : « la capacité d’imaginer que le commun est quelque chose de complètement humain, dans les gènes de tout le monde, a été plus ou moins effacé depuis 50 ans par la société de consommation. Et ce fonctionnement peut revenir très vite car naturel. On est sur des choses très simples. On n’a rien inventé! »

La gratuité de la plateforme
Dans ce sens, pour soutenir les petites structures qui souhaitent ouvrir un Épi, l’accompagnement offert par la plateforme se devait être gratuit. Comment se financent-ils ? Les plus gros fournisseurs des épiceries, ceux qui font plus de 10 000 euros de chiffre d'affaires annuel, payent 3% sur leur dépassement à Monépi.

Ainsi, fort de 400 Épis sur l’Hexagone, il y a en plus une à deux épiceries qui ouvrent chaque semaine, tant les valeurs de soutenabilité écologique, de manger local et de qualité sont porteurs pour de plus en plus de monde. Cette relocalisation du secteur marchand au cœur des bassins de vie répond surtout, nous dit Alain Poullot, au besoin de faire du lien, de retrouver un espace d’échange, de rencontre, de socialisation. Aujourd’hui 14 000 familles hexagonales y trouvent leur compte.

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