La vie bonne sera sociale et sociable

Le philosophe et anthropologue François Flahault impute "Le vide de la pensée progressiste..." à la transition que nous traversons entre deux visions de l'existence humaine : « a-t-elle ou non, précédé la vie en société ? »

Pour l’auteur du livre, Le Paradoxe de Robinson, qui fait référence aux récentes découvertes des sciences sociales, « la personne n’existe pas sans être porté par une vie sociale ». A contrario de ce qui continue d'alimenter majoritairement la pensée occidentale, il défend que la vie sociale a forcément précédé l'existence de l'individu et que reconnaître cela importe quand l'objectif est de concevoir une société bonne, riche de biens communs. Contrairement au modèle économique néolibéral qui en fait abstraction, ou plutôt pense que cela viendra en sus de la consommation.

Le Paradoxe de Robinson édité chez Mille et une nuit
Le Paradoxe de Robinson édité chez Mille et une nuit

C'est ce qui nous amène à nous intéresser à cette thèse développée où sont opposés homo économicus et homo sapiensvie utilitaire et vie socialebiens marchands et biens communs.

Economicus est doté par nature de sa propre existence, « sa raison d'être s'établit en relation aux choses et non en relation aux autres êtres humains. » Il est apte à défendre ses propres intérêts, d’autant plus, « avec la prépondérance de l’économie dans la sphère politique qui a fait s’évaporer la notion de bien commun remplacé par le libre marché ».  

Avec Sapiens, « on en viendra à penser l'existence même de l'être humain comme inséparable des réseaux dont il est lui-même une maille, réseaux des autres et des choses dont l'ensemble constitue son milieu de vie ».

Cela commence très tôt avec la conscience de soi-même suivie du sentiment d’exister. Puis avec ce besoin « avoir une place parmi les autres parce que c’est le fait de coexister avec d’autres qui permet à chacun de nous d’exister. ». C’est le premier bien commun avant que « mon existence réelle passe par le fait d’avoir (…) des parents, des amis, des collègues, et d’autres personnes qui sont là, dans mon entourage, des voisins, des passants, des commerçants du quartier. »

Enfin, « Conjurer le vide que toute conscience de soi porte en elle, faire qu'il y ait quelque chose plutôt que rien... ». Il s’agit d’échapper à l’ennui ou pire, à l’angoisse du manque d’être, voire de la mort. Contrairement au modèle Economicus qui n’offre que des biens marchands pour se donner égoïstement le sentiment d’exister en se différenciant du voisin, Sapiens voit son modèle « soutenir l'existence même de chacun en lui permettant de participer à un monde commun, en apportant des supports d'être ensemble, c'est à dire des choses matérielles et immatérielles, des centres d'intérêts et des activités qui créent du lien entre soi et les autres.»

Pour François Flahault, la confusion dont il traite est grave en ce que la vie en société doit être comprise comme une fin en soi qu’il faut entretenir et soigner en luttant contre l’individualisme consistant à la voir comme un moyen pour satisfaire des besoins individuels.

Avec ses 170 pages, le paradoxe de Robinson va bien sûr beaucoup plus loin dans les détails et sa lecture ne ne pourra que renforcer la conviction de ceux qui ont compris que la première étape d’une démarche de transition écologique consistait à repenser entièrement la vie sociale, l’actuelle étant, qu’on le veuille ou non, plutôt Economicus.

 

 

Que pensez-vous de notre nouveau site ?

Que pensez-vous de notre nouveau site ?

Choix