Cécile Helle, main verte dans un gant de velours
Volontariste, perçue par certains comme autoritaire, Cécile Helle, maire d'Avignon, traverse un mandat résolument tourné vers l'écologie. Abordant le défi climatique comme un effort collectif, elle fait face à des critiques, y compris fraternelles.
Être maire d’une ville comme Avignon, ville fortifiée de 93000 habitants, seizième aire urbaine de France, c’est avoir un pouvoir considérable sur la vie de milliers d’individus, mais aussi sur les communes qui l’entourent. Impossible de ne fâcher personne. Elle subit lors de son premier mandat plusieurs défections de ses conseillers municipaux. Y compris issus des rangs du PS, son propre parti.
Pourtant, Cécile Helle, maire d’Avignon depuis 2014, a réussi à se faire réélire en 2020 sur une liste Divers Gauche, désunie au premier tour, des écologistes, avec qui elle s’était alliée en 2014.
Avignon, ville Vauclusienne, est à la frontière du Gard. Une petite langue de terre, prolongement de l’île de la Barthelasse et le Rhône, la sépare de Villeneuve-les-Avignon et des Angles. Ces petites villes, en symbiose avec la cité des papes, sont parfois le refuge des Avignonnais les plus favorisés. Ils utilisent souvent leurs voitures pour parcourir les quelques kilomètres qui les séparent de leur travail.
Malgré ce contexte, l’édile a programmé une marche forcée pour la transition. Depuis 2014, de nombreuses rues ont été piétonnisées, la circulation a été revue. La maire a développé les pistes cyclables, les transports en commun, lancé 4 projets d’écoquartiers, etc. « Il ne s’agissait pas d’exclure la voiture, mais de rétablir un équilibre entre toutes les mobilités », explique Cécile Helle.
Avignon, future Ville en transition ? « Oui ! » répond la maire d’Avignon. « Je pense que sur ce mandat, il y a une progression forte de la ville nature. C’est toute la dimension de re-végétalisation et renaturation de la ville. »
Ses mesures, qui dans un premier temps ont contrarié beaucoup d’habitants, concrétisent peu à peu une ville plus agréable à vivre, y compris pour les plus pauvres. Elle annonce « pour plus de justice sociale » le lancement d’un projet de Réseau de chaleur qu’elle espère voir achevé en 2026.
Cécile Helle est visiblement fière de ce qu’elle a réalisé, en particulier pour les enfants : « On a impulsé un programme et un projet ambitieux sur la végétalisation des cours d’écoles », raconte la maire, « Je trouve que c’est des beaux projets parce que du coup il y a une vraie adhésion de la part des communautés éducatives et notamment de la part des enfants. » Elle poursuit sur les écoles : « On a choisi en 2015 de re-municipaliser les cantines scolaires. C'est-à-dire de reprendre en direct la confection des repas qui sont proposés aux enfants d’Avignon qui mangent à la cantine. Ça représente entre 5000 et 5500 repas / jour. » Des mesures écologiques qui favorisent la santé publique, mais aussi les agriculteurs locaux. « Un soutien non négligeable à leur activité économique », selon la maire.
Trop lent ? Trop écolo ? Pas assez démocratique ? Pas suffisamment libérale ? Au conseil municipal, les oppositions critiquent.
« Le centre-ville est en train de mourir, Avignon est à l'agonie et il est urgent, aujourd'hui, d'agir », dramatise, Anne-Sophie Rigault (candidate RN) lors d’un débat en 2020. Cécile Helle, pour la contredire, annonce plus de 3000 créations d’entreprises depuis son premier mandat. Et si le chômage a baissé sur la commune depuis 2014, passant de 12,3 % à 10 % en 2023, cette baisse est légèrement plus lente qu’au niveau national. « Pour une ville comme la nôtre, d’avoir un secteur de l’économie sociale est solidaire, et notamment de l’économie circulaire développé, ça peut être une première réponse à cet enjeu-là », avance la maire d’Avignon.
« Avignon est particulièrement sale, il y a des choses à faire, notamment sur le problème des collectes », rapportait Jean-Pierre Cervantès, candidat écologiste en 2020. Il partage le sentiment de nombreux habitants. En novembre, le collectif Avignon : saleté, insécurité et bouchons, aux revendications éclectiques, manifestait devant la mairie. En septembre, ils allaient jusqu’à contester les 3 fleurs octroyées à la commune pour ses efforts dans le verdissement et le fleurissement de la ville. « Des lieux emblématiques de notre cité, comme le Palais des Papes, ou les remparts [...] souffrent du manque de propreté et d’entretien de la part des services municipaux », écrit le collectif dans un long courrier au Conseil national des villes et villages fleuris.
À ceux qui lui reprochent « un enclavement de la ville » l’édile d’Avignon répond défi collectif. « Le défi climatique et écologique, il sera relevé collectivement. Et si on considère chacun, en tant que citoyen, qu’on n'a rien à assumer par rapport à ce défi, je crois qu’on ne va pas y arriver. » Il faudra le faire accepter « par l’explication et l’exemple » indique-t-elle. « Nous avons été l’une des premières villes à mettre en place un budget participatif » rétorque Cécile Helle, quand on lui parle démocratie locale. Elle met en avant la constitution d’un Conseil local des jeunes, et se révèle parfois plus à gauche qu’on l’y croirait. Faut-il sortir du capitalisme pour sauver la planète ? « Oui. », répond l’édile.